Face à l’enjeu important de la question de la transition énergétique, l’Echo du Saint Georges en fait ce mois-ci sa thématique principale. Etat des lieux, prospective, actions menées et à venir, réunions d’échanges et séminaires… l’AR Hlm est au cœur de cette question, au plus près des questions que se posent les organismes Hlm.
Parlons science-fiction et projetons-nous… pas si loin, en 2035 ! L’évolution des technologies sur les batteries et leur recyclabilité pourraient bien remettre la voiture au cœur de la vie des ménages.
La nouvelle technologie, dite bidirectionnelle, des voitures électriques permet d’utiliser l’énergie stockée dans la batterie du véhicule pour alimenter le réseau électrique domestique. Une fois chargée, la batterie pourrait restituer l’énergie stockée. Pour l’instant, cette nouvelle technologie n’est disponible que sur certains modèles très récents, mais toutes les nouvelles voitures à venir devraient en être équipées et les prévisions des constructeurs annoncent que dès 2030 toutes les voitures en service devraient en être pourvues.
Une étude internationale (publiée dans la revue « nature communications ») a montré que les besoins domestiques des pays développés (Etats-Unis, Chine, Inde et Europe) pourraient tout à fait être couverts par la redistribution des batteries des véhicules des ménages. On pourrait alors tout à fait imaginer qu’un utilisateur qui rechargerait sa voiture au moyen de bornes solaires ou dans le réseau de son entreprise puisse ensuite « brancher » sa voiture sur son réseau domestique et ne plus avoir à utiliser d’énergie électrique autre pour son logement.
Si on ajoute que la recherche sur les batteries devrait permettre d’augmenter leur durée de vie et d’effacer progressivement leur impact sur l’environnement (avec des batteries totalement recyclables en 2050), on peut facilement se projeter dans un monde où les voitures feront office de batteries sur roues.
Cette évolution pourrait être une vraie révolution pour la quittance de loyer des locataires Hlm.
Une sobriété provisoire potentiellement contraignante
Si le maître-mot de la transition, à l’heure actuelle, c’est de sortir des énergies fossiles d’ici 15 ans, il est clair qu’en attendant ce passage au logement rechargeable par la voiture, il devra y avoir une phase de transition que les bailleurs sociaux vont devoir anticiper. Cette étape pourrait bien être une phase de sobriété pendant laquelle il faudra peut-être accepter une baisse de confort. En hiver, le chauffage pourrait ne pas dépasser la température de 19°C et en été, le temps de rénover le bâti (recréer des logements traversants, favoriser la circulation d’air, traiter les ilots de chaleur urbains…) un inconfort sur quelques années pourrait être un passage obligé.
Pendant cette période, les bailleurs sociaux devront chercher, expérimenter, ajuster le mix énergétique, conclure des contrats de bio-gaz, se brancher sur des réseaux de chaleur, installer des panneaux photovoltaïques… faire des tests. Et voir comment tout cela impacte la quittance. De toute façon, la loi oblige les bailleurs à faire disparaître les logements du parc social étiquetés E, F et G d’ici 2035 (9 % du parc en Paca) et les logements C et D avant 2050 (66 % du parc de la région).
Cela veut dire qu’en l’espace de 25 ans, dans la région, il aura fallu rénover les trois-quarts du parc Hlm. Cela ne pourra se faire qu’en mettant en place un système industriel. Et en changeant radicalement la source énergétique. Les bailleurs vont devoir très vite organiser le mix biogaz/photovoltaïque. La France consomme 700 TWh par an. La moitié, 350 TWh, vient du gaz, dont 8 TWh seulement en biogaz, la marge est énorme.
Les parkings, prochain nerf de la guerre
Le corollaire est que les stratégies bas-carbone des bailleurs sociaux devront tenir compte de ces deux paramètres. Comment arriver à faire l’interface entre le mix-énergétique photovoltaïque/biogaz et la mobilité électrique de demain ? Ce sera tout le défi à relever dans les 20 ans qui viennent, en anticipant la dilution progressive des charges locatives énergétiques. A terme, c’est tout le business model du logement social qui pourrait être totalement reconverti.
L’AR Hlm se propose d’accompagner cette évolution. Passer le cap de la sobriété, rechercher de nouvelles technologies, pour ensuite passer à une situation où les organismes Hlm ne seront plus les fournisseurs exclusifs d’énergie sera effectivement un vrai défi.
Aujourd’hui, les bailleurs sociaux ont parfois du mal à dénombrer de façon précise les places de parking présentes sur leur patrimoine. Demain, ce pourrait bien être le nerf de la guerre. En y pensant dès aujourd’hui, on peut réaliser l’inventaire à peu de frais. Les terrasses sur les toits, les surfaces exploitables pour y installer des panneaux photovoltaïques, seront l’autre nerf de la guerre.
A échéance d’une vingtaine d’années, il se pourrait bien que le paysage économique des Hlm soit totalement reconverti. Le biogaz, la méthanisation, ce sera très bien pour le chauffage dans les prochaines années, mais ce sont quand même des combustibles qui polluent toujours un peu. Un jour (2050 ? 2100 ?), on peut penser que tout sera électrique et que tout sera recyclable.
Contact : Robin Hamadi – rhamadi@arhlmpacacorse.com
Le décryptage
État des lieux de la production d’électricité
Quelle que soit l’augmentation de la consommation d’électricité dans le monde, la part des énergies renouvelables dans sa production devrait considérablement augmenter, avec un bonus pour le solaire photovoltaïque. Pour l’heure, et pour la période obligatoire de transition, il est prudent pour les gestionnaires de résidences de préserver plusieurs sources d’énergie.
La production d’électricité au niveau mondial en 2019 est responsable de 40 % des émissions de CO2 liées à l’énergie, devant les transports, l’industrie et le bâtiment. Cela est dû principalement à l’utilisation du charbon (29 %) et du gaz (9 %). Au total, 60,6 % de la production mondiale d’électricité provient de combustibles fossiles, (35,4 % pour le seul charbon). L’Agence internationale de l’énergie (AIE) pense que l’augmentation attendue de la production d’électricité dans les prochaines années sera de plus en plus assurée par les énergies renouvelables.
En 2019, pour la première fois, les énergies renouvelables (solaire, éolien, biomasse, gaz vert…) ont pesé davantage dans le mix énergétique mondial (10,39 % en cumulé) que le nucléaire (10,35 %). On estime que la production mondiale d’électricité à partir de combustibles fossiles est arrivée à un seuil plafond depuis 2021, puisque les marchés émergents répondent désormais à la demande en accroissant la production par les énergies renouvelables.
Aujourd’hui, en termes d’impact sur la planète, les panneaux photovoltaïques atteignent un taux de valorisation de 94,7 % pour un module photovoltaïque à base de silicium cristallin avec un cadre en aluminium. Ils sont essentiellement composés de verre, d’aluminium et de semi-conducteurs. Les équipements annexes, tels les onduleurs et les accumulateurs, sont caractérisés comme déchets électroniques. Ils sont donc désormais hautement recyclables et peuvent être incorporés à la fabrication de nouveaux panneaux ou à d’autres processus industriels. Il est donc fort probable que le marché de ces panneaux se développe considérablement dans les années à venir.
Une croissance exponentielle de production de gaz vert
L’association Negawatt prévoit qu’en 2050 la France pourrait produire 150 TWh de gaz vert (contre 7 TWh en 2022). L’Ademe va plus loin en estimant cette production annuelle à 300 TWh. En anticipant le fait que la demande pourrait baisser, passant de 400 (niveau actuel) à 300 TWh, l’Agence espère que le gaz vert pourra donc répondre à la totalité de la demande à cette date (2050). D’ici là, et dans l’intervalle, il faut garder à l’esprit que ce gaz vert décarboné va intéresser tous les secteurs économiques, l’industrie en premier lieu, et ne sera pas forcément réservé au logement et au chauffage. Les propriétaires privés vont être incités à passer le plus vite possible à une solution pompe à chaleur, y compris par des incitations fiscales, mais les bailleurs sociaux auront théoriquement plus d’intérêt à conserver des solutions mixtes.
La France a décliné plusieurs scénarios pour atteindre la neutralité carbone en 2050 pour la production d’électricité. La production nucléaire tient une place plus ou moins grande selon les scénarios (de la moitié jusqu’à 0 % avec alors 100 % d’énergies renouvelables), mais la montée en puissance du solaire, de l’éolien et du gaz vert sont indéniables dans tous les scénarios.
Contact : Robin Hamadi – rhamadi@arhlmpacacorse.com