Un président élu depuis un peu plus d’un an, Pascal Friquet, et un directeur qui vient de prendre ses fonctions le 15 janvier, Robin Hamadi, vont présider aux destinées de l’Association régionale pendant les prochaines années. A l’occasion du 100ème numéro de la « Lettre du Saint Georges », nous leur avons demandé comment ils voyaient l’avenir. Anticipation est leur maître mot, suivi de très près par accompagnement (des adhérents et des locataires) et innovation.
Comment voyez-vous la mission de l’Association régionale ?
Pascal Friquet : Pour l’AR Hlm Paca & Corse, c’est un moment charnière parce que l’ensemble du mouvement Hlm est en pleine mutation. Nous voyons bien que le monde professionnel des organismes évolue à vitesse grand V. Nous avons assisté il y a peu de temps au regroupement des ESH, nous venons à présent d’entrer dans une phase de rapprochement des Offices et des SEM… La question de l’organisation du secteur est clairement posée et la réponse est entre nos mains.
Plus que jamais, le rôle fédérateur qu’ont joué les associations régionales est essentiel pour l’avenir du mouvement Hlm. Elles doivent même le renforcer et le multiplier face aux défis qui nous attendent. L’AR Hlm Paca & Corse prendra toute sa part à cette mission : garder unies et solidaires toutes les familles du mouvement Hlm, en garantir l’unité.
Si on revient sur le premier des thèmes de base de notre feuille de route, le développement de la production de logements sociaux, le défi est important et l’AR Hlm Paca & Corse mettra tout en œuvre pour le relever. En ligne de mire, l’année de référence 2016, avec ses 10 000 agréments, nous servira d’objectif à atteindre. Je suis confiant, on sent bien qu’un vrai dialogue est en train de se nouer entre tous les acteurs.
Et l’Association régionale se trouve de façon presque naturelle au cœur de ce dialogue. C’est de plus en plus flagrant dans notre relation aux métropoles de la région. Il y a de la part des responsables politiques une vraie envie de rapprochement avec l’AR Hlm pour dialoguer et échanger avec les bailleurs sociaux. A ce propos, la réunion organisée, dans les locaux de la métropole, par David Ytier, le vice-président délégué à l’habitat d’Aix-Marseille-Provence, est historique. Tous les bailleurs sociaux concernés étaient invités et tous étaient présents. Ce sont des signaux qui montrent que la volonté de dialogue est bien réelle et que l’AR Hlm a toute sa place à y jouer.
Robin Hamadi : Sur cette question des métropoles, il est clair que l’enjeu de la production de logements sociaux va se dénouer sur leurs territoires. Ce sont elles, de toute façon, les locomotives régionales de la production Hlm. Notre ambition est de faire de ces institutions de véritables partenaires de l’Association régionale. Il y a une volonté politique réelle de la part de leurs dirigeants, nous voulons transformer cela en actions. Il ne s’agira plus d’être sur de bonnes intentions, nous voulons bâtir avec les trois métropoles de la région un partenariat gagnant-gagnant, basé sur une contractualisation, avec des objectifs communs et concertés.
Nous finalisons à l’heure actuelle de finaliser une première convention avec la métropole Aix-Marseille-Provence. Nous allons adapter nos engagements pour proposer le même type de convention à Toulon-Provence-Méditerranée et Nice-Côte d’Azur. C’est un premier exemple du rôle d’interface active que l’AR Hlm Paca & Corse entend assumer dans les prochains mois et les prochaines années.
Comment cela va-t-il se concrétiser en interne ?
Pascal Friquet : Le challenge, pour le nouveau directeur, sera de donner une nouvelle dynamique à l’équipe en place. Cela va s’appuyer sur la feuille de route que le Conseil d’administration a validée pour 2021-2023, mais aussi, évidemment, sur un nouveau mode de management. Sur ce point, je laisse Robin s’exprimer.
Robin Hamadi : Mon objectif va être de réussir une transition, d’accompagner une équipe soudée de collaborateurs qui travaillent ensemble depuis de nombreuses années avec une réelle efficacité pour aller vers un nouvel environnement, une nouvelle feuille de route et de nouveaux horizons. Nous sommes dans un train en marche et nous allons prendre ensemble le prochain aiguillage, dans la direction fixée par le CA.
Cela voudra dire très certainement une nouvelle répartition des tâches dans l’équipe, pour répondre au plus près des attentes de nos adhérents, une pluridisciplinarité renforcée, qui tiendra compte évidemment des besoins et des demandes des collaborateurs. Une transition douce et constructive.
Quel est pour vous l’enjeu phare des prochains mois ou années ?
Pascal Friquet : ce ne sera pas le seul, mais il sera à l’évidence important : ce sera la transition énergétique, la résilience du patrimoine, la décarbonation de nos résidences. Et nous n’allons pas pouvoir éviter le problème des parkings. Il faudra anticiper l’électrification du parc automobile, installer des bornes de recharge dans nos parkings ! Le rôle de l’Association régionale est de donner à voir et à comprendre. Expliquer les manières de passer d’un système ou le gaz est important voir prépondérant à un patrimoine décarbonné. Ce sera une des grandes questions pour les organismes dans les prochaines années. L’AR Hlm a un rôle d’accompagnement, d’information, de présentation…
Robin Hamadi : La question cruciale sera celle des charges dans la quittance de loyer. Depuis quelques temps, les charges locatives augmentent sans cesse. Nous devons être très attentifs au coût de l’énergie pour nos locataires. Et que le reste à charge (loyer plus charges -apl) permette toujours d’avoir un loyer abordable. Dans cette équation, la question de l’énergie est déterminante dans le monde Hlm. L’Association régionale y aura un rôle pivot. Il va nous falloir peser sur les décisions des pouvoirs publics, peser sur les choix que vont prendre les organismes, faire évoluer le modèle économique du logement social. Un rôle de moteur, d’incitateur, de facilitateur, encore une fois un rôle d’anticipation.
Pascal Friquet : la volonté d’engagement de l’AR est forte ; dans l’accompagnement, dans l’information. Il appartiendra bien entendu, à chaque organisme de trouver ses solutions, rechercher au mieux comment contribuer à la réduction des gaz à effets de serre, réduire la consommation d’énergie dans ses logements pour ses locataires.
Robin Hamadi : Il y a deux leviers qu’on peut actionner. L’un ou l’autre, ou les deux simultanément. On peut essayer d’agir sur le coût de l’énergie, trouver la meilleure opportunité du marché. On peut aussi limiter la quantité d’énergie consommée, par le choix des matériaux, le choix des procédés. Dans cette idée, à l’extrême, on pourrait imaginer que nos bâtiments soient à énergie positive, ou à tout le moins neutre. Ce sera alors gagné, quel que soit le coût initial.
Bien sûr, je souscris tout à fait à la nécessité d’électrifier nos parcs de stationnement. Il y aura peut-être, du fait du développement du télétravail, des déplacements moins fréquents de nos locataires, mais il y a là à l’évidence un vrai sujet. Comment l’Association régionale peut-elle contribuer à ce débat ? Il nous faudra trouver la manière.
Le télétravail, justement, va également chambouler l’utilisation des logements…
Robin Hamadi : Bien sûr. Qui dit télétravail dit occupation plus importante des logements. Mais les organismes vont surtout être confrontés à la problématique du schéma familial qui change. Les parents ne partent plus forcément tous les matins. Comment vont se réorganiser les relations entre les membres de la famille ? Comment concevoir et penser des lieux où chacun pourra s’isoler temporairement ? C’est toute une réflexion sur la manière d’habiter, que les bailleurs sociaux ne seront pas les seuls à se poser d’ailleurs, que l’Association régionale va devoir accompagner et nourrir.
Au-delà de ce qu’on appelle la « cellule » du logement, l’intérieur en quelque sorte, il faudra aussi prendre en compte l’extérieur, et pas seulement sous la forme de terrasse ou de balcon, mais aussi et surtout l’aménagement des abords des résidences. Dans ce contexte nouveau, la paupérisation, la précarisation de certains locataires va être d’autant plus douloureuse. Comment les accompagner, comment prendre mieux en considération les personnes dépendantes ? Comment envisager, toujours dans ce contexte de télétravail et donc de présence accrue dans le logement, de nouvelles façons d’être voisins. Il y a là tout un pan d’innovation sociale, pour lequel les organismes Hlm sont en pointe et dont nous faisons la promotion à travers le Palmarès régional de l’habitat. Il faudra à l’avenir que l’AR Hlm soit encore plus en pointe sur ces sujets, aussi bien dans l’information de ses adhérents que dans la promotion auprès des partenaires et du public des actions innovantes menées par les bailleurs sociaux.
Comment voyez-vous l’avenir ?
Pascal Friquet : Nous continuerons à développer l’accompagnement des résidents, et donc notre capacité à créer des services innovants. Les organismes Hlm ont toujours été des créateurs innovants. L’USH a d’ailleurs choisi de communiquer sur cet aspect lors de la semaine Hlm organisée en juin.
Le Palmarès régional de l’habitat, dont parlait Robin, est une création de la région. Il est unique en France. L’Etat, l’AR Hlm Paca Corse, l’EPF, la Banque des territoires et Action Logement mettent à l’honneur tous les deux ans un certain nombre de réalisations exemplaires des bailleurs sociaux. Et dans les critères de choix du jury, l’accompagnement des locataires est désormais très présent.
D’une façon générale, le rôle de l’Association régionale est de mettre en lumière l’avenir, d’identifier les nouveaux modes de vie, les nouveaux usages, les nouveaux enjeux pour notre profession. Aujourd’hui, on raisonne encore pour les locataires qui sont dans nos logements, nos résidences sont construite pour un minimum de 60 années on doit donc se tourner sur les attentes de ceux qui vont y habiter demain ? L’AR Hlm doit aider les organismes à anticiper l’évolution sociétale. On raisonne toujours, par exemple, sur la famille historique, avec les deux parents ou même monoparentale, mais nous sommes déjà en décalage par rapport à la réalité. Sur la distance totale de la vie, et même si on peut le regretter, on passe le plus de temps « en solo ».
Le rôle essentiel de l’Association régionale, c’est d’être un précurseur dans ces domaines.
Robin Hamadi : Elle doit effectivement toujours être en anticipation. On y est d’ailleurs déjà. On a parlé des mobilités, on a parlé de la cellule du logement, de la transition énergétique, de l’innovation sociale, on pourra aussi aborder l’organisation générale des villes, comment les bailleurs sociaux vont avoir un rôle essentiel à jouer dans la rénovation-reconstruction des centres anciens. Dans toutes ces problématiques de demain, l’Association régionale a un rôle crucial à jouer.
Quelles actions concrètes envisagez-vous pour 2022 ?
Robin Hamadi : De façon pragmatique, le sujet important de cette année sera la finalisation des conventions métropolitaines dont je parlais tout à l’heure. Nous allons également approfondir les questions fondamentales posées par la crise sanitaire depuis deux ans. Et commencer d’ores et déjà à travailler sur la feuille de route 2024/2026.
Pascal Friquet : Nous parlons à juste titre des métropoles qui représentent une grande partie des potentialités de production de logements sur la région. Mais il faut également citer les territoires hors métropoles. Certains sont très actifs. Je pense à la CASA (communauté d’agglomération de Sophia Antipolis) par exemple, ou à la ville d’Avignon, qui ont toutes deux répondu à l’appel à projets du Logement d’abord, montrant ainsi leur dynamisme et leur volontarisme. Quelles actions mettre en place avec tous ces territoires ? Il nous faudra aussi élaborer des partenariats avec eux.
Et puis, je me permets de souhaiter bonne route à Robin Hamadi. Les présidents sont amenés à passer, le directeur reste. C’est lui le garant de l’action sur plusieurs années.